3.05.2016

Pourquoi une jolie fille comme toi est t-elle célibataire ?

Ou la difficulté de se mettre en couple quand on est (un peu) différent des autres.

Cette fameuse question, toutes les célibataires l’ont entendu, elle a son pendant masculin également. Il y a ceux qui s’en foutent, ceux qui en souffrent, et ceux qui sont partagés, comme moi. Si je suis attachée à une notion, c’est bien celle de la liberté. Je suis fascinée par la recherche de celle-ci, par la conquête de cette utopie. La première idée, quand on sait qu’on n’est pas libre et que l’on cherche à l’être, c’est d’être libre socialement. En étant célibataire, je suis donc « seule » dans un sens, je peux donc faire ce que je veux, sans que personne ne m’en empêche, ne m’en dissuade ou veuille tout simplement participer. Je fais partie de ces gens qui peuvent aller faire du shopping, visiter un musée seul, qui peuvent partir à l’aventure accompagnée uniquement d’un appareil photo. Je fais également partie de ces gens qui peuvent prendre un repas seul chez soi sans avoir besoin de télévision, portable ou autre chose pour se divertir. Être seule avec moi-même ne me fait pas peur.



Ça paraît bête dit comme ça, mais il y a plein de gens autour de moi qui ne peuvent pas, qui me demandent à quoi sert la table dans la petite cuisine de mon appartement d’étudiante, et qui manque de s’égosiller quand je leur dis que c’est pour manger. Non, être avec moi-même n’est pas forcément glauque, et je ne peux cesser de m’interroger sur ces personnes incapables de se satisfaire à elle-même, et j’en arrive alors à la conclusion que dans ce cas-là, effectivement, être en couple est plus qu’une nécessité.

Je suis heureuse de ne pas avoir d’attache, de me dire que je peux potentiellement continuer mes études à Paris l’année prochaine, à 500km de chez moi, que je peux aussi continuer mes études dans d’autres contrées, voir y vivre lorsque je serais dans ce qu’on appelle « la vie active ». Rien ne m’empêche de faire des projets, de rêver, de me dépasser, de sortir de mes frontières sans que quelqu’un me regarde et tente de me retenir silencieusement. Mais plus que changer de pays, je peux aussi changer moi-même, sans que quelqu’un se demande où est passé l’ancien moi, cette personne à qui il s’était attaché. Je n’ai pas de culpabilité à changer mes opinions, à évoluer, à avancer, en espérant que l’homme qui partage ma vie ne soit pas déçu et décide de m’accompagner dans la même voie que moi. Je suis heureuse du fait qu’on n' attende rien de moi et que je n’attende rien en retour. Je n’attends pas un message, je n’attends pas un cadeau particulier à la Saint Valentin, je n’attends pas de déclaration d’amour qui ne viendra peut-être jamais. Tout cela est certainement égoïste, mais peut-être que c’est indétachable de la notion de liberté.

Alors peut-être que oui, toutes ses raisons font que je ne recherche pas activement une personne qui pourrait être à mes côtés, ou que j’en repousse de nombreux. Parce que ce n’est pas comme si je vivais dans une cave et que personne ne tentait de me séduire. Attention, je ne dis pas que mon physique est digne d’une mannequin, il suffit de faire un tour sur Facebook pour remarquer que ce n’est bien évidemment pas la beauté bien trop subjective qui fait que nous sommes en couple et que des hommes nous aguichent. Et si beaucoup se demandent pourquoi je suis célibataire, il faudrait peut-être qu’il se demande pourquoi tant de gens sont en couple. On peut rapidement constater que le fruit d’une rencontre est souvent expliqué comme un hasard chanceux : ils étaient à une soirée entre amis et ce sont bien entendus, le lendemain, ils étaient en couple. Ils travaillaient dans la même boite, ils étaient dans la même classe… Comme si le hasard permettait à autant de personnes de trouver leur âme soeur, la vrai de vrai, celle pour la vie, celle du mythe de l'androgyne, comme ça aussi simplement, en un claquement de doigt, ou en une petite pression permettant de libérer la flèche de Cupidon. La triste réponse est qu’en fait, ces gens auraient pû être avec plein d’autres gens, que leur partenaire est facilement remplaçable, et force est de constater que, quand ils rompent, ils sont effectivement très vite remplacé. Ça peut paraître critique, mais j’ai tout de même une certaine admiration pour ces personnes capables de s’adapter s’y facilement, de tout partager, de ne faire qu’un avec une autre personne sélectionnée assez rapidement pour son physique et/ou quelques qualités morales primordiales.

Cependant, étant tout de même célibataire depuis un certain moment, je commence à en voir les limites. Il y a les petites limites qui me font rire et qui étaient tout de même bien pratiques. Être en couple me permettait d’avoir des rapports réguliers, ça me permettait également d’avoir une bonne image de moi, de m’accepter physiquement, de m’assumer pleinement en tant que femme. Ce que me procurait l’attention d’une personne sur moi est difficilement remplaçable.

Plus loin que ça, il y a également la pression sociale, je la ressens de plus en plus. Je suis en train de devenir un ovni pour les autres, car il n’est pas vraiment acceptable socialement d’être célibataire endurci, même en 2016. Je dois supporter les regards attendris des gens qui me demandent comment ça se fait, qui me rassure à coup de « ne t’inquiète pas, tu en trouveras un » comme on parle d’une paire d’escarpins. Il a aussi les gens qui se permettent de dire que je suis trop difficile, parce qu’il n’y a rien de pire que cette parole. Désolé de ne pas me mettre avec le premier venu, non ça ne m’intéresse pas de passer mes week-ends avec un mec qui a de beaux cheveux, mais qui a autant de conversation qu’un théière. Désolé de chercher quelqu’un qui me ressemble un minimum, quelqu’un avec qui je pourrais partager des centres d’intérêt comme mon attrait pour toutes les formes d’art, avec qui je pourrais avoir des discussions plus poussées que la dernière vidéo qui buzz sur le net ou qui tenteront de combler leur manque de point commun et le vide de  ensemble leurs journées passées par une série de visionnage de films.

C’est peut-être une des raisons importantes qui fait qu’aujourd’hui, je rencontre régulièrement des hommes, j’accepte des rendez-vous, j’échange des sms jusqu’à tard le soir. Au final, ça ne va jamais nul part, lui ou moi se rend compte que nous ne sommes pas faits pour être ensemble, et à chaque fois, il y en a un autre qui apparaît de je ne sais où, et ça recommence.

Si j’ai encore l’espoir de trouver quelqu’un, c’est aussi parce que j’y crois. Non pas à l’amour éternel, mais à un amour qui pourrait être fort et puissant. Qui embellirait ma vie et me ferait sentir vivante. Je crois que je cherche quelqu’un avec qui je pourrais être moi-même comme je le suis quand je suis seule. Dans les choses les plus stupides, comme chanter et danser devant lui sans me sentir ridicule. Dans les choses qui comptent pour moi, j’aimerais lui dire que demain, je reprends l’écriture de mon livre, que je me mets au sport, à la guitare, au végétarisme ou je ne sais quoi, sans qu’il se moque de moi et de mes projets qui changent tous les jours. Mais comme dans les choses les plus profondes, je veux quelqu’un avec qui je peux partager mes doutes sur ma vie, sur les souffrances que j’ai vécues, sur mes peurs, sur mes joies…

Ça peut paraître simple, mais je n’ai encore jamais trouvé personne avec qui je peux être moi-même, peut-être que là se cache la raison du célibat, de la difficulté d’arriver à être soi-même avec quelqu’un, ou alors, de la difficulté à trouver quelqu’un avec qui il est possible d’être soi-même.

Dans le premier cas, il y a la peur de montrer qui on est. Les gens différents ont peur de montrer qui ils sont, parce que la différence se sent dès l’enfance et qu’on a vite pris pour habitude de porter un masque pour que l'on ne se moque pas de nous, pour éviter le rejet.

Cette différence induit aussi, statistiquement, une plus grande difficulté à trouver quelqu’un de semblable. Je crois alors, même si ce n’est qu’un avis personnel, qu’il serait vain de chercher d’être en couple en attendant de trouver la bonne personne, et qu’il est préférable de s’appuyer sur des relations amicales. Parce que oui, il y a des amis avec qui ont peut-être nous-mêmes. Même si cela ne fait bien sûr pas tout, ça permet de résister, dans un monde où le paraître prime et où mon moi profond disparaît de plus en plus derrière un déguisement surfait et conditionné au rythme des modes et tendances.

Voilà donc pourquoi, pour tous ceux qui me le demandent, aujourd’hui, je suis célibataire.

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